Origine du nom Ainsi dĂ©nommĂ©e en l'honneur de la Grande ArmĂ©e, qui a fait les campagnes du premier Empire ; voisinage de l'Arc de Triomphe de l'Etoile. Histoire de la rue PrĂ©cĂ©demment, avenue de la Porte Maillot ; antĂ©rieurement, avenue de Neuilly. C'Ă©tait une partie de la route nationale n°13. PC 075 116 21 V0029 89 avenue de la Grande ArmĂ©e Permis de construire Demande du 09/06/21 Inconnu RĂ©habilitation-extension d'un immeuble de bureaux Ă r+8 sur 6 niveaux de sous-sol aprĂšs dĂ©molition partielle d'un plancher au premier Ă©tage pour crĂ©ation d'un volume en double-hauteur, dĂ©pose de l'intĂ©gralitĂ© des façades existantes et crĂ©ation de nouvelles façades. mise aux normes du bĂątiment en matiĂšre de sĂ©curitĂ© incendie par la construction de plusieurs escaliers, dont un escalier de type chambord. valorisation des sous-sols et de la toiture-terrasse et rĂ©amĂ©nagement du parvis. surface créée 1691 mÂČ. surface dĂ©molie 930 mÂČ. PC 075 116 16 V0045 M01 83 avenue de la Grande ArmĂ©e Permis de construire Demande du 16/04/19 Favorable avec rĂ©serve RĂ©ponse du 05/08/19 AccessibilitĂ© et amĂ©nagement de la terrasse du r+8 mezzanine, modification des grilles de ventilation en façades et d'un ouvrant au r+8 mezzanine et adaptations mineures Ă l'intĂ©rieur d'un bĂątiment de bureaux. modificatif au pc 075 116 16 v0045 dĂ©livrĂ© le 1er dĂ©cembre 2016. l'accessibilitĂ© et l' amĂ©nagement de la terrasse du r+8 mezzanine, la modification des grilles de ventilation en façades et d'un ouvrant au r+8 mezzanine et adaptations mineures Ă l'intĂ©rieur d'un bĂątiment de bureaux. DP 075 116 18 V0126 152 avenue de Malakoff DĂ©claration prĂ©alable Demande du 01/03/18 Favorable avec rĂ©serve RĂ©ponse du 01/04/18 L'abattage de 3 arbres. DP 075 116 17 V0759 85 avenue de la Grande ArmĂ©e DĂ©claration prĂ©alable Demande du 11/12/17 DĂ©favorable RĂ©ponse du 01/01/18 Modification d'un panneau d'information. DP 075 116 17 V0758 89 avenue de la Grande ArmĂ©e DĂ©claration prĂ©alable Demande du 11/12/17 DĂ©favorable RĂ©ponse du 01/01/18 Modification d'un panneau d'information. DP 075 116 17 V0713 89 avenue de la Grande ArmĂ©e DĂ©claration prĂ©alable Demande du 24/11/17 Favorable RĂ©ponse du 01/01/18 Remplacement des portes d'accĂšs au hall cĂŽtĂ© avenue malakoff. PC 075 116 16 V0045 83 avenue de la Grande ArmĂ©e Permis de construire Demande du 09/08/16 Favorable avec rĂ©serve RĂ©ponse du 01/12/16 RĂ©habilitation d'un bĂątiment de bureaux de r+8 sur 6 niveaux de sous-sol et mise aux normes d'accessibilitĂ© et de sĂ©curitĂ©, avec modification des circulations verticales, dĂ©molitions partielles et reconstructions de plancher, modification des façades sur rue et cour, rĂ©amĂ©nagement de la terrasse au r+8, crĂ©ation d'une serre agricole et installation de panneaux photovoltaĂŻques. surface supprimĂ©e 826 mÂČ surface créée 802 mÂČ. st 5693 mÂČ. DP 075 116 16 V0071 152 avenue de Malakoff DĂ©claration prĂ©alable Demande du 03/02/16 Favorable avec rĂ©serve RĂ©ponse du 12/04/16 Changement de destination d'un local de bureau Ă rez-de-chaussĂ©e sur patio, en crĂšche de 50 berceaux. PC 075 116 15 P0056 87 avenue de la Grande ArmĂ©e Permis de construire Demande du 26/10/15 Favorable RĂ©ponse du 25/04/16 RĂ©amĂ©nagement de la station ligne 1 de la porte maillot avec dĂ©molition de 2 couloirs pour crĂ©ation de 4 couloirs de correspondance vers la gare rer e porte maillot, avec dĂ©placement d'une sortie de secours et implantation d'un bĂątiment provisoire d'accĂšs Ă la station, sur la place, pendant les travaux. surface supprimĂ©e 268 mÂČ. surface créée 637 mÂČ. DP 075 116 11 V0261 152 avenue de Malakoff DĂ©claration prĂ©alable Demande du 23/05/11 Favorable RĂ©ponse du 23/06/11 DP 075 116 10 V0691 152 avenue de Malakoff DĂ©claration prĂ©alable Demande du 17/12/10 DĂ©favorable RĂ©ponse du 14/02/11 La modification des grilles de fermeture des accĂšs au parking. PC 075 116 06 V0021 02 83 avenue de la Grande ArmĂ©e Permis de construire Demande du 30/06/08 Favorable RĂ©ponse du 28/10/08 Le dĂ©placement des ouvrants de dĂ©senfumage et pompiers en façades, des sorties en toiture, la modification de distribution en sous-sol, des sorties techniques en terrasse et crĂ©ation de 3 places de stationnement 2 roues. PC 075 116 06 V0021 M1 164 avenue de Malakoff Permis de construire Demande du 10/08/07 Favorable RĂ©ponse du 31/01/08 Le changement de destination de locaux Ă rez-de-chaussĂ©e, Ă usage de commerce en bureau. PD 075 116 06 V0026 164 avenue de Malakoff Permis de dĂ©molir Demande du 15/06/06 Favorable RĂ©ponse du 10/04/07 La dĂ©molition de parties de planchers, de façades, de murs porteurs, de toiture et d'escaliers intĂ©rieurs Ă tous les niveaux d'un bĂątiment de r+9 Ă©tages sur 6 niveaux de sous-sol, Ă usage de bureau, de commerce et de stationnement. PC 075 116 06 V0021 164 avenue de Malakoff Permis de construire Demande du 15/06/06 Favorable RĂ©ponse du 10/04/07 La restructuration d'un bĂątiment de 9 Ă©tages sur 6 niveaux de sous-sol, Ă usage de bureaux, restaurant d'entreprise et stationnement 15 843 mÂČ, avec changement de destination partiel Ă rdc en commerce 296 mÂČ, crĂ©ation de planchers Ă tous les Ă©tages et modifications de façades shon créée 2 525 mÂČ
1Pour Ă©prouver JĂ©sus, un docteur de la Loi lui demanda ce qu'il devait faire pour avoir la vie Ă©ternelle. JĂ©sus l'oblige Ă se rappeler le premier commandement - Tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cĆur, de toute ton Ăąme, de toute ta force» cf. Dt 6,4-5 - et le second, qui lui est semblable tu aimeras le prochain comme toi-mĂȘme» Mt 22, Mais, voulant se justifier, le docteur de la Loi demanda Et qui est mon prochain ? » JĂ©sus lui rĂ©pondra par la parabole du bon Samaritain Lc 10,25-37 le prochain» n'est ni le prĂȘtre ni le lĂ©vite, qui refusent tous deux de s'arrĂȘter devant l'homme laissĂ© Ă demi-mort par les brigands, mais un Samaritain - un Ă©tranger, membre d'un peuple venu d'ailleurs et ayant osĂ© Ă©riger un sanctuaire en dehors de JĂ©rusalem - parce qu'il a exercĂ© la misĂ©ricorde envers lui». 1 DANIEL-ROPS, LâĂglise de la cathĂ©drale et de la croisade, Paris, Lib. ArthĂšme Fayard, 1952, p. 42. 2Le Moyen Ăge n'aura pas retenu cette leçon. Valorisant le mĂȘme et rejetant le diffĂ©rent, la mentalitĂ© mĂ©diĂ©vale se mĂ©fie de l'Ă©tranger dans lequel elle redoute la possibilitĂ© d'un conflit par affrontement de deux identitĂ©s contraires. BientĂŽt confondu avec l'Autre», le PaĂŻen, identifiĂ© facilement Ă l'ennemi qu'il faut combattre, l'Ă©tranger n'est pas vraiment un prochain». D'ailleurs, l'idĂ©e de chrĂ©tienté», forgĂ©e avec l'Empire carolingien puis ottonien, dĂ©veloppĂ©e avec la rĂ©forme grĂ©gorienne et parvenue Ă son apogĂ©e au XIIIe siĂšcle, avec Innocent III, insiste sur ce qui rapproche les chrĂ©tiens, en estompant les diffĂ©rences. Peuple de Dieu», la chrĂ©tientĂ© est une communautĂ© sans liaison nĂ©cessaire avec un cadre gĂ©ographique, Ă l'intĂ©rieur de laquelle tous les membres se sentiront chez eux1». 3Si, virtuellement, la ChrĂ©tientĂ© est cosmique lĂ oĂč il y a des baptisĂ©s, lĂ il y a ChrĂ©tientĂ©, les chrĂ©tiens plus Ă©loignĂ©s, ceux qui diffĂšrent par la langue, les mĆurs, le rite, voire certains aspects du dogme, en font-ils vraiment partie, sont-ils vraiment des prochains qu'il faut aimer comme soi-mĂȘme? 4Je me propose ici de montrer, Ă partir des chroniques de la quatriĂšme croisade Ă©crites par Clari et Villehardouin, dans quelle mesure Occident et Orient peuvent se connaĂźtre. La perspective ne serait pas complĂšte si la vision des Occidentaux sur les Byzantins n'Ă©tait pas complĂ©tĂ©e et corrigĂ©e par celle des Grecs, grĂące aux chroniques de NicĂ©tas ChoniatĂšs et de Georges AkropolitĂšs. Une relation difficile 5Tracer l'histoire des relations entre Byzance et l'Occident excĂ©derait de beaucoup l'espace d'un article. Contentons-nous de rappeler que l'effondrement de l'Empire Romain d'Occident et les changements de la configuration gĂ©opolitique qui s'ensuivirent invasions barbares», avancĂ©e foudroyante de l'Islam, etc. vont dresser une barriĂšre entre Occident et Orient. La communication entre les deux espaces devient de plus en plus difficile. On ne se comprend plus. Les Occidentaux, mĂȘme les plus instruits, ignorent le grec et, Ă partir du XIe siĂšcle, on retrouve l'adage grĆcum est, non legitur. De leur cĂŽtĂ©, les Byzantins, qui se dĂ©signent comme Romains» et se jugent les seuls hĂ©ritiers de la tradition impĂ©riale, ne cherchent pas Ă connaĂźtre les espaces extĂ©rieurs Ă l'autoritĂ© de l'Empire. Ils confondent chrĂ©tiens et paĂŻens dans une Barbarie» pĂ©riphĂ©rique, au sein de laquelle il n'y a pas de diffĂ©rence essentielle entre Barbares d'Occident» et Barbares d'Orient». 6De plus en plus sĂ©parĂ©s, les deux espaces vont Ă©voluer chacun de leur cĂŽtĂ©. Une suite de rivalitĂ©s feront monter la tension et Ă©largir le fossĂ© entre Rome et Byzance. Le concile de ChalcĂ©doine 451 accorde au patriarcat de Constantinople le second rang aprĂšs Rome, jugeant avec raison que la ville qui est honorĂ©e de la prĂ©sence de l'empereur et du SĂ©nat [...] est comme [Rome] grande dans les affaires ecclĂ©siastiques, Ă©tant la seconde aprĂšs elle» canon 28. Le patriarche de Constantinople s'appelle ĆcumĂ©nique», provoquant les protestations de GrĂ©goire le Grand 593. L'alliance de la PapautĂ© avec les premiers Carolingiens, la constitution des Ătats pontificaux par l'attribution au pape de Ravenne, vassale de l'Empire, et, surtout, le couronnement de Charlemagne Ă Rome comme empereur d'Occident suscitent un fort mĂ©contentement Ă Byzance. La crise photienne 859-880, sur le contrĂŽle des nouvelles chrĂ©tientĂ©s et sur la primautĂ© romaine, envenime encore les relations. Le schisme de 1054, avec l'excommunication rĂ©ciproque du patriarche CĂ©rulaire et des lĂ©gats pontificaux, n'est que le terme prĂ©visible d'une longue suite de mĂ©sententes. La sĂ©paration n'est toutefois pas encore ressentie comme dĂ©finitive. Les Occidentaux, surtout les marchands italiens, sont bien accueillis Ă Byzance et n'y sont pas traitĂ©s comme Ă©trangers. Cependant, peu Ă peu, une image prĂ©formĂ©e de l'autre tend Ă s'imposer les Grecs identifient les Latins Ă des Barbares illettrĂ©s et cupides, coalisĂ©s contre Byzance qu'ils jalousent; les Latins s'irritent devant le rituel sophistiquĂ© de la cour impĂ©riale et le discours diplomatique prĂ©cieux des Grecs, jugĂ©s effeminĂ©s Ă force d'ĂȘtre civilisĂ©s et perfides». Des deux cĂŽtĂ©s, la perception de l'autre s'entretient Ă la fois de mĂ©fiance et de fascination. 2 Ibid., p. 537. 3 Quand il sâagit de combattre, les Latins sont irrĂ©sistibles. Pourtant, si les adversaires les attaq ... 4 Pour dĂ©signer les Occidentaux, Anne emploie indistinctement les termes Latins », Francs » et ... 5 Pour chaque chef croisĂ© Anne rapporte une histoire qui atteste lâamour du lucre. 7Les grands dĂ©placements humains vers l'Orient, suscitĂ©s par les croisades, allaient-ils permettre, en mettant en prĂ©sence» les deux mondes, une meilleure connaissance de l'autre et en corriger l'image prĂ©formĂ©e? Au contraire, mettant en contact les raffinĂ©s Byzantins et les rudes guerriers d'Occident, elle aboutit trĂšs vite Ă l'incomprĂ©hension, aux froissements, Ă l'hostilitĂ©2 ». Anne ComnĂšne, fille et historien de l'empereur Alexis Ier, est un bon tĂ©moin des lieux communs dĂ©jĂ installĂ©s des deux cĂŽtĂ©s. Si la princesse reconnaĂźt la bravoure incontestable des Latins, leur fougue au combat3, elle n'en ignore pas l'inconstance, l'arrogance, le mĂ©pris des engagements pris. Si le Basileus redoute les nombreuses troupes franques4 en marche vers l'Orient, c'est qu'il connaissait leur Ă©lan irrĂ©sistible, leur caractĂšre instable et versatile [...]; il savait qu'ils ont toujours la bouche ouverte devant les richesses et qu'Ă la premiĂšre occasion on les voit enfreindre leurs traitĂ©s sans scrupules» t. II, X, v, 4, p. 206-207. Anne se fait aussi l'Ă©cho des griefs des Latins contre les Grecs, pour les rĂ©futer. L'accusation de perfidie», de manquement Ă la parole donnĂ©e, n'est pas fondĂ©e si l'empereur n'a pas accompagnĂ© les croisĂ©s avec les siens, comme il l'avait promis, pour marcher ensemble sur JĂ©rusalem, c'est qu'il n'a pas voulu manifester l'infĂ©rioritĂ© de ses troupes ». Il a assurĂ© en Ă©change le ravitaillement de leurs armĂ©es, leur a donnĂ© de bons conseils t. II, X, v, 9; ix, 11, de l'argent et des cadeaux t. III, XI, VIII, 5. En somme, pour les Orientaux, les croisĂ©s ne sont que des brutes rapaces». De leur cĂŽtĂ©, malgrĂ© le serment de fidĂ©litĂ© vassalique prĂȘtĂ© Ă Alexis Ier pour toutes les terres Ă reconquĂ©rir aux Musulmans, les Occidentaux rendent NicĂ©e mais gardent Ădesse et surtout Antioche. 8Le contact entre les deux mondes avait surtout rĂ©vĂ©lĂ© aux yeux Ă©blouis des frustes guerriers venus du couchant l'immense richesse de Constantinople, soit son principal tort». C'est la convoitise qui, selon Anne ComnĂšne, motive cette grande ruĂ©e vers l'Orient. Les Latins qui [...] convoitaient depuis longtemps l'empire romain et voulaient s'en emparer [...] provoquĂšrent ce grand mouvement en trompant les plus honnĂȘtes» t. II, X, vi, 7, p. 2125. Dans ces conditions, la mĂ©fiance de l'empereur est justifiĂ©e connaissant bien ses soi-disant alliĂ©s », il prĂ©voyait leur inconstance et le manque de foi de ces hommes, prĂȘts Ă vendre leurs femmes et leurs enfants pour une obole t. III, XI, ii, 2, p. 11. Les participants Ă la premiĂšre croisade qui passent par Constantinople en donnent d'ailleurs une description Ă©merveillĂ©e, tel Foucher de Chartres, auteur d'une Histoire de JĂ©rusalem 6 CitĂ© par J. LE GOFF dans La Civilisation de lâOccident mĂ©diĂ©val, Paris, Arthaud, 1964, p. 181. Quelle noble et belle citĂ© est Constantinople ! Combien on y voit de monastĂšres et de palais construits avec un art admirable ! Que d'ouvrages Ă©tonnants Ă contempler sont Ă©talĂ©s dans les places et les rues ! Il serait trop long et trop fastidieux de dire en dĂ©tail quelle abondance de richesses de tout genre, d'or, d'argent, d'Ă©toffes de mille espĂšces et de saintes reliques on trouve dans cette ville6. 9Faut-il alors s'Ă©tonner que, lors de la deuxiĂšme croisade, Manuel ComnĂšne ait conspirĂ© avec les Turcs contre l'empereur Conrad III ou que les relations avec Louis VII et ses Français furent si mauvaises que le CapĂ©tien forma le dessein de s'emparer de Constantinople? D'autre part, la prospĂ©ritĂ© des marchands italiens Ă©tablis dans la capitale de l'Empire suscita des jalousies au point que le mĂȘme Manuel se vit dans l'obligation d'expulser les VĂ©nitiens en 1171, ce qui n'arrĂȘta pas la rĂ©action xĂ©nophobe des Byzantins et le massacre des Occidentaux rĂ©sidant Ă Constantinople, perpĂ©trĂ© en 1182. La haine monta des deux cĂŽtĂ©s pour venger le massacre des Latins, les Normands se livrĂšrent au pillage de Thessalonique; l'empereur Isaac II l'Ange, Ă son tour, traitait avec Saladin contre les croisĂ©s. La proximitĂ© permet enfin aux Orientaux et aux Occidentaux de prendre conscience de leurs diffĂ©rences religieuses. Si Anne ComnĂšne souligne Ă plusieurs reprises que c'est leur foi chrĂ©tienne qui vaut aux croisĂ©s la faveur populaire et l'aide impĂ©riale, malgrĂ© la transgression des engagements pris, si elle ne mentionne pas la question des pains azymes ni celle du Filioque, si mĂȘme elle ne qualifie jamais les Latins d'hĂ©rĂ©tiques, elle se montre beaucoup moins favorable au clergĂ© latin, jugĂ© trop engagĂ© dans les affaires politiques et militaires. Latins et Grecs ne se font pas en effet la mĂȘme idĂ©e de la fonction sacerdotale. 10Le prĂȘtre grec, parce qu'il est consacrĂ©, doit se garder de s'impliquer dans les affaires du siĂšcle. Au contraire, le barbare latin Ă la fois participe aux divins mystĂšres, passe le bouclier au bras gauche, et du droit tient une lance ; en mĂȘme temps qu'il communie au corps et au sang divins, il est spectateur de carnage et devient un homme de sang [.]. Telle est cette espĂšce barbare de prĂȘtres qui sont tout autant des guerriers» t. II, X, viii, 8, p. 218. La princesse est Ă©galement trĂšs sĂ©vĂšre au sujet des prĂ©tentions du pontife romain Ă la primautĂ© universelle, ce qui n'est d'ailleurs qu'arrogance de [sa] part» lorsque le siĂšge de l'empire fut transfĂ©rĂ© Ă Constantinople, du mĂȘme coup fut transfĂ©rĂ© le premier rang dans la hiĂ©rarchie Ă©piscopale» t. I, I, xiii, 4, p. 48. Par une ironie du sort et la politique aidant, ce qui aurait dĂ» rapprocher les deux espaces achĂšve de les sĂ©parer. Le choc » de la quatriĂšme croisade 11C'est dans ce contexte que survient la quatriĂšme croisade. PrĂȘchĂ©e par Foulques de Neuilly et divers prĂ©dicateurs populaires, l'expĂ©dition eut pour chef Thibaut III de Champagne, remplacĂ© aprĂšs sa mort par Boniface de Montferrat, Baudouin de Flandre, le comte de Saint-Pol et Geoffroy de Villehardouin. Le vĂ©ritable initiateur en fut Innocent III 1198-1216, le plus grand pape du Moyen Ăge. Le pontife qui allait porter la papautĂ© au faĂźte de sa puissance considĂ©rait comme un devoir de dĂ©livrer la Terre Sainte. Il souhaitait que la chrĂ©tientĂ© entiĂšre participĂąt Ă cette entreprise et, pour assurer la pleine harmonie entre l'Empire d'Orient et l'Occident, jugeait que le premier devait se soumettre Ă l'autoritĂ© pontificale. 7 Villehardouin en fait grief Ă ceux qui prĂ©fĂ©rĂšrent aller sâembarquer ailleurs, contribuant ainsi Ă ... 8 GEOFFROY DE VILLEHARDOUIN, La ConquĂȘte de Constantinople XVII, 90, dans A. PAUPHILET, Historiens ... 12Les Ă©vĂ©nements qui ont prĂ©sidĂ© Ă la quatriĂšme croisade et abouti au sac de Constantinople sont bien connus. Comme les croisĂ©s Ă©taient incapables de payer aux VĂ©nitiens la somme de 85 000 marcs exigĂ©e pour la traversĂ©e7, le doge Henri Dandolo leur proposa de les en tenir quittes Ă condition qu'ils prennent pour les VĂ©nitiens la citĂ© de Zara, leur concurrente de la cĂŽte dalmate, vassale du roi de Hongrie. En vain l'abbĂ© de CĂźteaux leur enjoignit, de par l'apostole de Rome de ne pas assaillir cette citĂ©, car ele est de crestiens et vos estes pĂšlerins8». Le doge se montre inflexible. Les croisĂ©s se lanceront Ă l'assaut de Zara en chantant Veni Creator Spiritus. Et trestout, et grant et petit plorerent de pec [Ă©motion] et de le grant goie qu'i eurent» Clari, La ConquĂȘte de Constantinople, XIII, 62. 13Ce fut le premier dĂ©tournement de la croisade et les foudres de l'excommunication pontificale allaient tomber en vain. Sur ces entrefaites survient le jeune Alexis, fils de l'empereur Isaac II, que son frĂšre, Alexis III, avait fait dĂ©trĂŽner et aveugler. Les rĂ©cits des deux chroniqueurs divergent sur ce point. Alors que, selon Villehardouin, le roi Philippe de Souabe, beau-frĂšre du vaslet, envoie des messagers auprĂšs des croisĂ©s pour leur demander de rĂ©tablir sur son trĂŽne le souverain lĂ©gitime XIX, Clari dit que le doge Dandolo aurait fourni aux croisĂ©s une raisnavle acoison» [bonne raison] d'aller en GrĂšce et de prendre viandes en le terre et autres coses» [d'y prendre des vivres et autres choses] XVII, 66. Les deux chroniqueurs sont pourtant d'accord quant aux conditions de l'aide Alexis promettait aux croisĂ©s 200 000 marcs, des vivres, des soldats qui se joindraient aux Latins pour aller ensemble sur JĂ©rusalem. Villehardouin est le seul Ă mentionner la promesse, faite par le roi Philippe au nom d'Alexis, de mettre tot l'empire de Romanie Ă la obedience de Rome, dont ele ere partie pieça» XIX, 92. Si Clari affirme que les croisĂ©s allĂšrent chercher en Allemagne le jeune Alexis en lui promettant de le rĂ©tablir en ses droits, pour che qu'il eussent acoison d'aler en le tere de Constantinoble» XXIX, 90, le jeune prince leur promettant quanque il vaurroient » [tout ce qu'ils voudraient] XXXII, 92, il ne mentionne pas la question de l'unitĂ© des deux Ăglises. En vain l'abbĂ© de Vals, de l'ordre de CĂźteaux, avertit les croisĂ©s qu'ils ne devaient pas s'attaquer aux Grecs, que ce ere sor crestiens» Villehardouin, XX, 93, en vain le pape interdit, en mai 1203, d'envahir les terres de l'empire 9 Epist. 6, 101, dans A. FLICHE et V. MARTIN, Histoire de lâĂglise, t. X, La ChrĂ©tientĂ© romaine, Pari ... Que nul de vous ne se flatte d'avoir le droit d'occuper ou de piller le territoire des Grecs. Il aura beau dire que cette terre n'est pas soumise Ă l'Ăglise romaine, que l'empereur qui la dĂ©tient et qui a fait crever les yeux Ă son frĂšre est un usurpateur [...] Ne consacrez vos forces qu'Ă dĂ©livrer la Terre Sainte et Ă venger l'injure du CrucifiĂ©. S'il vous faut butin et conquĂȘte, prenez-le donc sur le Sarrasin, notre vĂ©ritable ennemi9. 14L'irrĂ©parable Ă©tait accompli le 17 juillet 1203, aprĂšs un premier assaut, l'usurpateur Alexis III s'enfuit, Isaac et son fils sont rĂ©tablis. 15Mais, chose prĂ©visible, les relations entre ces alliĂ©s de fortune» allaient vite mal tourner les Latins, hautains, traitent les Grecs en conquis et exigent le paiement de la somme due. HumiliĂ©s et inquiets par la prĂ©sence de ces occupants rapaces, les Grecs ne vont pas tarder Ă se rĂ©volter sous l'instigation d'Alexis Doukas, dit Murzuphle, qui fit d'ailleurs supprimer les deux empereurs. Furieux, les croisĂ©s ripostĂšrent aprĂšs trois jours d'assaut, ils s'emparĂšrent de Constantinople le 13 avril 1204. Ce fut le plus grand pillage du Moyen Ăge. 10 Epist. 8, 126, adressĂ©e au lĂ©gat Pierre de Saint Marcel, dans P. CHRISTOPHE, 2000 ans dâhistoire de ... 16Innocent III laisse Ă©clater son indignation contre les exemples de perversité» et les Ćuvres des tĂ©nĂšbres» des Latins qui ne laissent point espĂ©rer le retour de l'Ăglise grecque Ă l'unitĂ©10. L'Empire byzantin allait cesser d'exister durant 60 ans, remplacĂ© par un Ă©phĂ©mĂšre Empire Latin d'Orient et par une multitude de royaumes et principautĂ©s » le royaume de Thessalonique donnĂ© Ă Boniface de Montferrat, le duchĂ© d'AthĂšnes attribuĂ© Ă Otton de la Roche, la principautĂ© d'AchaĂŻe-MorĂ©e adjugĂ©e par Geoffroy de Villehardouin. 17L'idĂ©e absurde de transposer en Orient le systĂšme fĂ©odal d'Occident rĂ©duisait les Grecs Ă un statut d'infĂ©rioritĂ©. Non moins dĂ©sastreuse fut la tentative d'imposer dans les territoires conquis la juridiction ecclĂ©siastique de Rome et le rite latin. La hiĂ©rarchie latine, artificiellement Ă©tablie, n'avait aucune autoritĂ© sur les fidĂšles indigĂšnes cette tentative d'union forcĂ©e des deux Ăglises creusera un fossĂ© infranchissable entre les deux mondes, que les tentatives ultĂ©rieures de dialogue, dictĂ©es surtout par des raisons politiques, n'arriveront pas Ă combler. 18Pour longtemps, on peut le constater encore aujourd'hui, Occident et Orient allaient devenir des Ă©trangers », chacun opposant Ă son partenaire non le visage fraternel du prochain» mais celui inquiĂ©tant de l'autre». Avant de dĂ©chiffrer dans les textes les divers visages de l'autre, arrĂȘtons-nous un instant sur le sens de la croisade pour trouver une Ă©ventuelle explication du dĂ©tournement de la quatriĂšme. 11 La Crociata, mito politico », dans Studi sulla storia e sullâidea di crociata, Roma, Jouvence, 19 ... 19L'un des historiens les plus avisĂ©s du phĂ©nomĂšne de la croisade, Franco Cardini, rappelle que cette entreprise de la chrĂ©tientĂ© synthĂ©tise dans une forme inĂ©dite deux pratiques qui existaient depuis quelque temps dĂ©jĂ la guerre contre les musulmans, menĂ©e sub vexil-lium sancti Petri en Espagne, en Italie mĂ©ridionale, et la peregrinatio pĆnitentialis11. 12 Epist., PL 132, c. 566, 653. 20Appelant les chevaliers d'Occident Ă libĂ©rer la Terre Sainte, Urbain II n'avait d'autre visĂ©e que de rĂ©cupĂ©rer ces territoires, berceau du christianisme. Une croisade ayant un autre but que la terra sanctissima Ă©tait inconcevable. Le grand thĂ©oricien et apologiste de la croisade, Bernard de Clairvaux, rappelle que la terre oĂč JĂ©sus est nĂ©, oĂč il a accompli des miracles et a subi sa Passion, est hereditas Dei, terre promise dont les chrĂ©tiens sont les hĂ©ritiers lĂ©gitimes. Il est donc juste et nĂ©cessaire que l'hĂ©ritier dĂ©fende son hĂ©ritage et se le voie restituer. ModĂšle de la guerre juste, dans la conception de saint Bernard, la croisade est voie de purification et forme de pĂ©nitence12 ». 13 Le DĂ©cret de Gratien 1140 affirmait que les hĂ©rĂ©tiques et les schismatiques pouvaient ĂȘtre contra ... 14 LE GOFF, La CivilisationâŠ, p. 179. Il est vrai que la justification officielle de lâextension de la ... 21La croisade pose toutefois la paix Ă l'intĂ©rieur de la chrĂ©tientĂ© et la guerre en dehors d'elle, par confrontation avec les paĂŻens. Mais, Ă l'intĂ©rieur de la chrĂ©tientĂ©, il y avait Ă©galement des chrĂ©tiens sĂ©parĂ©s, excommuniĂ©s et schismatiques, situĂ©s par leur propre choix Ă l'extĂ©rieur du corpus christianorum dont ils devenaient les ennemis. Ces chrĂ©tiens » Ă©taient-ils encore des prochains » ? Depuis que le pape GrĂ©goire VII avait traitĂ© d'hĂ©rĂ©tique quiconque n'Ă©tait pas soumis au siĂšge apostolique, les canonistes allaient affirmer qu'enlever la vie Ă un excommuniĂ© Ă©tait moins grave que de tuer un infidĂšle13. DĂ©jĂ , lors de la deuxiĂšme croisade, l'Ă©vĂȘque de Langres exhortait le roi de France Louis VII Ă s'emparer de Constantinople, arguant que les Byzantins n'avaient de chrĂ©tien que le nom». Une faction importante de l'armĂ©e occidentale se rangeait Ă cet avis, estimant que les Grecs n'Ă©taient pas chrĂ©tiens et que les tuer Ă©tait moins que rien14». Visages de l'autre L'autre mĂ©connu 22Dans ces conditions, il n'est pas Ă©tonnant que les deux cĂŽtĂ©s prĂ©sentent une image stĂ©rĂ©otypĂ©e de l'autre, dominĂ©e par une vision prĂ©formĂ©e, les lieux communs, la mĂ©fiance et la peur de ce qui est diffĂ©rent. 15 Voir aussi XXXVII, 110. 16 Bateaux de charge, permettant dâembarquer des chevaux. 23Pour Villehardouin, les Grecs sont lĂąches». Ils reculent devant le combat lorsqu'il s'agit de dĂ©fendre leurs positions - et quant ce vint as lances baissier, li Grieu lor tornĂšrent les dos si s'en vont fuiant, et lor laissent le rivage » [mais quand vint le moment de baisser les lances, les Grecs leur tournĂšrent le dos et leur abandonnĂšrent le rivage] XXXI, 105 -, mĂȘme s'ils sont dix fois plus nombreux que leurs adversaires et nus de la citĂ© n'issi fors encontre eus, et fu mult granz merveille, que por un que il estoient en l'ost, estoient-ils dui cent en la ville » [et personne dans la citĂ© ne sortit contre eux, et ce fut grande merveille, car pour un seul homme de l'armĂ©e croisĂ©e, ils Ă©taient deux cents dans la ville] XXXIII, 10715. LĂąchetĂ© encore plus mĂ©prisable, selon Clari, lorsqu'elle s'accompagne de vantardise. Jaloux des faveurs et de la confiance que l'empereur Manuel ComnĂšne avait tĂ©moignĂ©es aux Français, ses sujets le pressent de les Ă©loigner, protestant de leur fidĂ©litĂ© et de leur capacitĂ© Ă dĂ©fendre leur seigneur envers et contre tous. Mais lorsque l'empereur leur demanda qu'il s'armaissent et qu'i li aidaissent a corre sus les Franchois», voyant les Français s'avancer en bon ordre de bataille, li Grieu eurent molt grant paour des Latins que il virrent si aprochier d'aus [...] si tornent en fuies, si laissent l'empereur trestot seul» XVIII, 70. Plus tard, lors du premier siĂšge de la citĂ©, les Grecs qui estoient venu au rivage desfendre, [...] s'estoient vantĂ© Ă l'empereeur [Alexis III] que ja n'i arriveroient li pelerin tant comme il i fussent» XLIII, 110. Il suffit que les chevaliers sortent de leurs huissiers16 et donnent la chasse aux Grecs pour que ceux-ci s'enfuient Ă l'intĂ©rieur de la citĂ©. Un peu plus tard, Ă la seule vue des garçons de cuisine si laid et si hideus », que les chevaliers avaient eu l'idĂ©e de faire armer de divers instruments de cuisine, la pietaille l'empereur [...] si en eurent grant peur et grant hisde [horreur] que onques ne s'oserent mouvoir, ne venir vers aus» XLV, 116. Les chefs des Grecs sont les premiers Ă prendre la fuite, en dĂ©pit de leur supĂ©rioritĂ© numĂ©rique Ă©vidente. Ă la vue des troupes franques chevauchant ferme contre ses hommes, Alexis III fut si Ă©baubi [Ă©bloui] et si esbahi» qu'il ne trouva d'autre solution que la fuite, mĂȘme si les Latins, trop Ă©loignĂ©s, n'avaient pas l'intention de marcher contre les troupes de l'empereur XLVIII, 122. La couardise n'empĂȘche pas les Grecs de se montrer grossiers lors du second siĂšge de Constantinople, au terme d'une premiĂšre attaque Ă©chouĂ©e des croisĂ©s, ils monterent seur les murs et avaloient leur braies et moustroient leur leurs culs » [montĂšrent sur les murs, baissĂšrent leur culotte et leur montrĂšrent leur derriĂšre] LXXI, 154. Quant Ă l'usurpateur Alexis Murzuphle, il eut le front d'affirmer aux siens qu'il avoit desbaretĂ© [mis en fuite] et desconfit seigneur Henri [frĂšre de Baudouin de Flandre] et sa gent», alors qu'il s'Ă©tait retirĂ© en catastrophe, laissant entre les mains des Français une icĂŽne de Notre Dame rĂ©putĂ©e assurer la victoire en bataille. Il finira par s'enfuir misĂ©rablement Quant Morchofles li traitres vit qu'il ne fuiroient nient [...] si eut si grant peur qu'il laissa ses tentes et ses juiaus illuec [abandonna sur place ses tentes et ses joyaux], si s'en fui avant en le chitĂ© », bientĂŽt suivi par ses soldats LXXVIII, 164. 24Quant aux Occidentaux, ils sont tous des preux. Rappelons la fougue d'Aleaume de Clari, frĂšre du chroniqueur, qui, attaquĂ© de tous cĂŽtĂ©s par les Grecs, si sake le coutel [tira son coutelas], si leur keurt sus, si les faisoit aussi fuir devant lui comme bestes » LXXVI, 162. Mentionnons encore AndrĂ© Durboise qui, selon le mĂȘme Clari, sans se dĂ©courager par la rude rĂ©sistance des assiĂ©gĂ©s, grimpe sur une tour de la ville et met Ă lui seul en fuite les soldats byzantins. 17 O City of Byzantium. Annals of Niketas ChoniatĂšs, trad. Harry J. Magoulias, Detroit, Wayne State Un ... 18 Nikita CHONIATĂS, dans Izvoarele istoriei RomĂąnilor, vol. III, Scriitori bizantini sec. XI-XIV, Ă© ... 19 CHONIATĂS, O City of Byzantium, p. 314 Je traduis. 20 AKROPOLITĂS, dans IzvoareâŠ, p. 401. 25Il faut reconnaĂźtre que les Grecs se montrent plus objectifs sur la valeur militaire de leurs adversaires. NicĂ©tas ChoniatĂšs Ă©crit qu'ils sont mis en fuite par la haute taille des Latins, de Pierre d'Amiens notamment, et par la forme insolite de leurs heaumes il Ă©tait impossible de les fixer du regard, tellement leur forme Ă©tait horrible Ă voir17. Plus tard, aprĂšs la chute de Constantinople, il affirmera encore que les Latins, habiles au combat et toujours prompts Ă l'attaque», feront tuer beaucoup des gens de Johannitsa le Blaque en Thrace. Lors du siĂšge de Russion, en fĂ©vrier 1206, l'armĂ©e des Latins, formĂ©e de gens de haute taille et admirables au combat», sera vaincue par les Scithes au terme d'un affrontement oĂč les uns et les autres combattirent avec un Ă©gal courage18». Il est sans doute plus rĂ©confortant de se savoir vaincu par un adversaire vaillant. ChoniatĂšs reconnaĂźt toutefois que ses concitoyens abandonnent aussitĂŽt la partie ils n'essaient mĂȘme pas de rĂ©sister aux assaillants. L'empereur Alexis III montera dans les appartements de l'impĂ©ratrice et ne s'armera que lorsqu'une partie de la ville sera dĂ©jĂ en flammes. Plus tard, lors de l'attaque dĂ©cisive contre la citĂ© l'ennemi [...] ne trouva personne Ă s'engager ouvertement dans la bataille ou Ă prendre les armes afin de rĂ©sister19 ». Georges AkropolitĂšs ajoute qu'au siĂšge d'Andrinople seule une ruse peut venir Ă bout des Italiques ». Ceux-ci ont l'habitude de chevaucher de fiers destriers, le corps entiĂšrement couvert d'armures et, pour cette raison, sont lourds lorsqu'ils sont attaquĂ©s20». 21 Peut-ĂȘtre parce quâil est prĂ©sentĂ© par les croisĂ©s, le jeune prince est du cĂŽtĂ© des ennemis, devenu ... 26Cependant, les deux chroniqueurs français retiennent la dĂ©loyautĂ© pour trait dominant de leur portrait gĂ©nĂ©rique des Grecs. Dans sa longue digression qui restitue les Ă©vĂ©nements dĂ©roulĂ©s Ă Byzance pendant la seconde moitiĂ© du XIIe siĂšcle XVIII-XXVIII, la chronique de Clari abonde en noires trahisons, celles d'Andronic XXI ou d'Alexis, comblĂ© de bienfaits par son frĂšre Isaac XXVII et XXVIII ; en violences, avec le viol et l'enlĂšvement de la princesse ThĂ©odora par son cousin Andronic ; en crimes innombrables le mĂȘme Andronic assassina le jeune empereur et fist tant de si grans desloiautes que onques nus traitres ne nus mourdrissierres [meurtriers] tant n'en fist» XXI, 74. Alexis III est un usurpateur, qui tient sa terre Ă tort et Ă pechiĂ©, contre Dieu et contre raison», comme le lui rappelle Conon de BĂ©thune Villehardouin, XXIX, 103, dans un discours qui fait preuve d'une Ă©gale opacitĂ© Ă l'autre, car il s'appuie essentiellement sur les valeurs de la fidĂ©litĂ© fĂ©odale, telle que la concevaient les Occidentaux. Les Grecs refusent de reconnaĂźtre leur seignor naturel», le prince Alexis, que le doge de Venise et Boniface de Montferrat exhibent» dans une nef qui longe les murs de Constantinople Villehardouin, XXX, 103 ; ils rĂ©pondent qu'il nel reconnoissoient mie Ă seigneur et qu'il ne savoient qui il estoit» Clari, XLI, 10821. Ils ne respectent pas leurs engagements Ă l'instigation de Murzuphle, Alexis IV refuse de payer aux croisĂ©s la somme convenue. Enfin, ils acceptent, sans rĂ©agir, de voir leurs empereurs trahis et tuĂ©s Murzuphle va s'emparer d'Alexis alors que celui-ci dormait, le fera jeter en prison, tentera deus foiz ou trois emposoner; et ne plot Dieu que il morut» XLVIII. Alors il le fit Ă©trangler, chauça les houses vermoilles [chaussa les bottes vermeilles] par l'aide et par le conseil des autres Grecs. Si se fist empereor». Villehardouin de conclure Or oĂŻez se onques si orrible traĂŻsons fu faite par nule gent» XLVIII, 121. Murzuphle sera Ă son tour aveuglĂ© et connaĂźtra une mort ignominieuse Clari, CIX, 204; Villehardouin, LX, 133 et LXVIII, 141. 22 Jean DUFOURNET, Les Ă©crivains de la IVe croisade. Villehardouin et Clari,2 vol., Paris, Presses Uni ... 27En somme, les Grecs sont constants dans la dĂ©loyautĂ© li Grieu n'orent mie la felonie fors de lor cuer, qui mult estoient desloial» Villehardouin, LXXXIV, 147 et on ne peut faire confiance Ă des gens qui si desloiaument traĂŻssoient li uns l'autre» LXI, 133. Jean Dufournet observe Ă juste titre que cette insistance sur la mauvaise foi des Grecs serait censĂ©e expliquer pourquoi les Occidentaux leur ont refusĂ© les postes de responsabilitĂ© et les ont traitĂ©s de suspects22. 28TraĂźtres qui abandonnent leurs empereurs lĂ©gitimes, passent Ă l'ennemi, ne respectent pas la parole donnĂ©e, traĂźtres surtout parce qu'ils se sont soustraits Ă l'autoritĂ© de Rome, car anchienement avoient estĂ© kil de le chitĂ© obedient a le loi de Rome, et ore [...] il disoient que li lois de Romme ne valoit rien, et disoient que tout kil qui i crooient estoient chien» Clari, LXXII, 154, les Grecs ne mĂ©ritent aucune pitiĂ©. Leur faire la guerre, prendre leurs terres n'estoit mie pechies, ains estoit grans aumosnes [mais au contraire une Ćuvre trĂšs charitable] » 156, comme le rappellent les Ă©vĂȘques » aux pĂšlerins avant le second assaut de Constantinople, pour apaiser leurs scrupules la bataille estoit droituriĂšre, car il estoient traiteur et mordris-seeur, et qu'il estoient desloial quant il avaient leur seigneur droiturier mordri [assassinĂ©], et qu'il estoientpieur que Juis » LXXIII, 156 - je souligne. Selon son habitude, Villehardouin rapporte l'Ă©vĂ©nement en termes plus pondĂ©rĂ©s Porquoi nos vos disons [...] que la bataille est droite et juste; et se vos avez droite entention de conquerre la terre et mettre Ă l'obĂ©dience de Rome, vos arez le pardon tel com l'Apostoiles le vos a octroiĂ© XLVIII, 121- je souligne. C'est la premiĂšre fois que l'argument de la diffĂ©rence religieuse est invoquĂ©, et non la trahison fomentĂ©e par Murzuphle contre les souverains lĂ©gitimes», pour justifier la prise de Constantinople par les croisĂ©s. 23 CHONIATĂS, O City of Byzantium, p. 316. 24 Ibid. 25 Ibid. p. 331. 29On n'est pas plus tendre du cĂŽtĂ© grec. ChoniatĂšs raconte que les croisĂ©s, accueillis par la population avec des branches de lauriers et des icĂŽnes, ne feront preuve d'aucune pitiĂ© et s'adonneront Ă tous les sacrilĂšges Ă©glises profanĂ©es, objets de culte volĂ©s, l'autel de Sainte Sophie dĂ©membrĂ©, richesses de l'Ă©glise pillĂ©es. Les Latins ne laissent derriĂšre eux que ruine et dĂ©solation sans faire preuve du moindre sentiment d'humanitĂ©, ils saisirent argent et biens, maisons et vĂȘtements, ne laissant Ă personne rien de ses biens23 ». Si les Grecs ont Ă©tĂ© punis pour leurs pĂ©chĂ©s, les croisĂ©s, sous prĂ©texte de dĂ©livrer le Saint SĂ©pulcre, se sont ouvertement dĂ©chaĂźnĂ©s contre le Christ et ont pĂ©chĂ© en faisant chavirer la Croix par la croix qu'ils portent sur leurs Ă©paules [...] Les fils d'IsmaĂ«l n'ont pas agi de la sorte24». Ătrangers Ă la pitiĂ©, les Latins ne connaissent pas les limites de leur faiblesse et se montrent arrogants envers Celui qui les a rendus forts. S'allier avec eux, comme l'ont fait aprĂšs la conquĂȘte certains concitoyens de ChoniatĂšs, fut une erreur car il Ă©tait mal de servir les Latins dont la langue diffĂšre de celle des Grecs, qui sont cupides par nature, dont l'Ćil est privĂ© de discernement, l'estomac insatiable, l'Ăąme violente et pleine de courroux, dont la main est toujours prompte Ă saisir l'Ă©pĂ©e25 ». 26 IzvoareâŠ, p. 315. 27 O City of Byzantium, p. 297. 28 IzvoareâŠ, p. 301. 30Cette image projetĂ©e sur l'autre empĂȘche de le connaĂźtre rĂ©ellement. Lors de la rĂ©volte des Byzantins d'Arcadius contre les Latins, aprĂšs la conquĂȘte de Constantinople, les Romains » prennent pour peur la prudence des Latins. Ils seront sĂ©vĂšrement dĂ©confits et ChoniatĂšs rappelle que ce jour-lĂ offrit une image digne de pitiĂ© et de dĂ©solation26». L'autre refusĂ©, diabolisĂ©, acquiert des dimensions cosmiques. Ce ne sont pas la faiblesse militaire et les intrigues politiques des Grecs, ce ne sont pas non plus la convoitise des Occidentaux et leur technique militaire supĂ©rieure qui dĂ©terminent la victoire des uns et la dĂ©faite des autres. Des deux cĂŽtĂ©s, c'est la volontĂ© mĂȘme de Dieu qui dĂ©cide de la chute de Constantinople. Rien ne retarde le voyage des croisĂ©s, le temps leur est favorable et surtout ils savent que Constantinople est une autre Sybaris, cĂ©lĂ©brĂ©e pour son penchant aux plaisirs27». Les Ă©vĂ©nements qui prĂ©cĂšdent de quelques annĂ©es la prise de Byzance sont autant de signes du malĂ©fique pouvoir qui menait inexorablement Ă sa perte l'Ătat des Romains28 ». La conquĂȘte de la citĂ© est en somme une punition pour les pĂ©chĂ©s du peuple. Ă titre d'exemple, le chroniqueur mentionne le geste impensable de l'empereur Isaac ne pouvant honorer les engagements pris par son fils Alexis vis-Ă -vis des croisĂ©s, il ordonnera de faire fondre l'or des icĂŽnes, sacrilĂšge qui appelle et justifie les malheurs Ă venir. Clari, Ă son tour, parle explicitement de miracle de Dieu LXXIV, 160 Ă propos de l'exploit de Durboise. La Providence» est omniprĂ©sente dans la chronique de Villehardouin. C'est sur elle qu'il rejette la responsabilitĂ© de la dĂ©viation et de l'enlisement final de l'expĂ©dition. 31Dans ces conditions, le dialogue est impossible. L'aveuglement Ă l'Ă©gard de l'autre empĂȘche de le voir» rĂ©ellement. On se trouve, tel le prince Alexis, devant des murs imprenables, renforcĂ©s de chaĂźnes. On les longe mais l'entrĂ©e en est dĂ©fendue. On se regarde des deux cĂŽtĂ©s avec une sorte de fascination sans se voir vraiment 29 Ă remarquer toutefois que le regard des Grecs est retenu par la flotte des croisĂ©s, si bien Ă©quipĂ©e ... Quant chil de Constantinoble virent chel estoire [flotte] qui si estoit belement apareilliĂ©s, si l'eswarderent a merveille, et estoient montĂ© seur les murs et seur les maisons pour eswarder chele merveille ; et chil de l'estore eswarderent le grandeur de le vile, qui si estoient longue et lee, si s'en remerveillerent molt durement Clari, XL, 106 - je souligne29. L'autre imaginĂ© 30 Lâadjectif riche » et les mots de la famille merveille » dominent dans les chapitres LXXXI-XCII ... 32L'autre serait-il vouĂ© Ă rester mĂ©connu? Si, pour l'essentiel, la mĂ©fiance domine des deux cĂŽtĂ©s, on assiste, chez Robert de Clari notamment, Ă une timide tentative de dĂ©couvrir l'autre. Si l'image de Byzance qu'il propose n'est pas plus vraie», elle essaie de se conformer Ă l'horizon d'attente du public du XIIIe siĂšcle. DĂ©jĂ les romans antiques » avaient proposĂ© un Orient mythique, monde fabuleux, exotique, incroyablement riche. Or telle est l'image de Constantinople que le chroniqueur nous offre. Il insiste d'abord sur ses immenses richesses car nus hom terriens, qui tant eust mes en le chitĂ© [si longtemps qu'il eĂ»t rĂ©sidĂ© dans la citĂ©], ne le vous porroit nombrer ne aconter [dĂ©crire] [...] le chentisme part de le riqueche, ne de le biautĂ©, ne de le nobleche qui estoit Ăšs abeĂŻes et Ăšs moustiers et Ăšs palais et en le vile»XCII, 182. Le regard Ă©bloui dĂ©taille les diverses merveilles »30 de la citĂ© les palais de BoucolĂ©on et de Bla-kerne, le moustier Sainte Sophie, l'Ă©glise des Saints ApĂŽtres, les deux portes de la ville, celle du Manteau d'Or et la Porte DorĂ©e, les Jeux de l'empereur l'antique Hippodrome, les colonnes des stylites, recouvertes d'images et d'inscriptions prophĂ©tisant toutes les aventures et toutes les conquestes qui sont avenues en Constantinoble, ne [ou] qui avenir i devoient» Ibidem. Villehardouin, quant Ă lui, se contente de mentionner, en conquĂ©rant, l'importance du butin LĂ refu li tresors si trĂšs granz trovez, [.] et fu si granz li gaains faiz que nus ne vos en sauroit dire la fin, d'or et d'argent, et de vaisselement et de pierres precieuses, et de samiz et de dras de soies, et de robes vaires et grises et hermines, et toz les chiers avoirs qui onques furent trovĂ© en terre [et le butin fut si grand qu'on ne saurait l'Ă©valuer or et argent, vaisselle et pierres prĂ©cieuses, samit et Ă©toffes de vair, de petit-gris et d'hermine, et tous les biens de prix qui fussent jamais trouvĂ©s sur terre] » LV, 128. 33La ville est tout aussi riche en reliques deux morceaux de la vraie Croix», le fer de la Lance, une fiole contenant le Sang du Christ, la Couronne d'Ă©pines, etc. ; Ă©galement en objets possĂ©dant des vertus mĂ©dicales miraculeuses les colonnes de Sainte Sophie censĂ©es guĂ©rir du mal de reins et autres maux divers ou le tuyau qui faisait sortir le venin» du corps. La profusion des reliques est destinĂ©e Ă susciter l'admiration du lecteur, tout comme elles auront Ă©bloui le modeste chevalier qu'Ă©tait Clari, mais nullement Ă reconnaĂźtre Ă Constantinople le statut de citĂ© privilĂ©giĂ©e, protĂ©gĂ©e » par ces saintes reliques. Au contraire, lors du premier siĂšge de Constantinople, Mur-zuphle tente un coup de force Ă la tĂȘte de 4 000 hommes armĂ©s, emportant avec lui une icĂŽne de Notre Dame que li empereeur portent avec aus quant il vont en bataille ; et si grant fianche ont en chel ansconne que il croient bien que nus qui le port en batalle ne puet estre desconfis » LXVI, 146. AprĂšs un premier moment d'hĂ©sitation, les Français dĂ©cideront qu'il vaut mieux morir en desfendant que en fuiant». Ils fonceront sur les Grecs qui, dĂ©semparĂ©s devant tant de bravoure, abandonneront l'enseigne impĂ©riale, l'icĂŽne et un riche butin. L'Ă©pisode est rapportĂ© par les deux chroniqueurs qui insistent sur le signe » que la perte signifie A l'aide de Dieu, fu desconfiz l'emperere Morchufles» Villehardouin, XLIX, 122; pour chou que Morchophles ne le portoit mie a droit, creons nous qu'il fu desconfis » Clari, LXVI, 146. La perte de l'icĂŽne est Ă©galement perçue par ChoniatĂšs comme un chĂątiment divin, qui marque le dĂ©but des calamitĂ©s. 34Si la profusion de reliques ne garantit plus l'invulnĂ©rabilitĂ© de la citĂ©, elle confirme peut-ĂȘtre que, pour les croisĂ©s, Constantinople l'Orient n'est pas seulement l'enjeu d'un combat terrestre mais aussi le but d'une quĂȘte spirituelle. La citĂ© impĂ©riale apparaĂźt dans les deux chroniques françaises comme un lieu mythique, qui permet et justifie sa substitution Ă JĂ©rusalem. 35Dans la mĂȘme ligne d'exotisme s'inscrit la description donnĂ©e par Clari des Coumans, alliĂ©s de Johannitsa le Blaque Che sont une gent sauvage, qui ne erent [labourent] ne ne semment, ne n'ont borde [cahutes] ne maison, ains ont unes tentes de feutre, uns habitacles ou il se muchent [se rĂ©fugient], et si vivent de lait, de formage et de char. [...] Cascuns d'aus a bien dix chevax ou douze ; si les ont si duits [dressĂ©s] qu'il les sivent partout lĂ oĂč il les voellent mener. Ils n'ont pour armes qu'unes vesteures de piax de mouton et portent ars et saietes [flĂšches] avec aus LXV, 144. 36Villehardouin, qui les mentionne aussi, ne retient aucun de ces dĂ©tails pittoresques, mais se borne Ă dire qu'ils n'estoient mie bap-tezié» LXXIX, 151, qu'ils feignent de prendre la fuite devant les Français pour contre-attaquer ensuite, comme gens qui ne savoient mie assez d'armes», ce qui sĂšme la dĂ©route parmi les chevaliers LXXXI, 153. 37Clari propose encore plusieurs Ă©pisodes qui tiennent du romanesque. Lors du premier assaut de la ville, les dames et demoiselles montees as fenestres [...] et as murs de le chitĂ© [admirent les Français qui leur semblent des anges], si erent il bel, pour chou qu'il estoient si belement armĂ© et leur cheval si belement couvert» XLVII, 120. Elles blĂąmeront d'ailleurs durement Alexis III pour s'ĂȘtre honteusement retirĂ© devant ces beaux chevaliers. Ce n'est pas que l'Ă©pisode, rappelant mainte description de tournois dans les romans chevaleresques, fasse vrai ». Mais il propose de l'Ă©vĂ©nement et finalement de l'autre un visage familier. 31 Clari ajoute que ces deux statues se trouvaient devant les bancs des changeurs, croulant sous les m ... 32 Le Legs du Moyen Ăge, Melun, 1950, p. 234. 33 Les images et inscriptions recouvrant les deux colonnes du centre de la ville traduisent la mĂȘme di ... 38Parmi les exotismes et merveilles Ă©numĂ©rĂ©s par le chroniqueur, deux mĂ©ritent une attention particuliĂšre. La porte du Manteau d'Or est surmontĂ©e d'une statue de cuivre, couverte d'un manteau d'or et portant l'inscription suivante tout chil qui mainent en Constantinoble un an doivent avoir mantel d'or aussi comme jou ai» LXXXVIII, 178. Deux autres statues de femmes, si bien faites et si natureument et si beles que trop », reprĂ©sentent une autre merveille. L'une d'elles, la main tendue vers l'Occident, portait l'inscription suivante De vers Occident venront chil qui Constantinoble conquerront». Et li autres ymages tendoit [se] main en vilain lieu, si disoit 'Ichi les boutera on' » XCI, 18031. L'auteur Ă©tait-il capable de lire les inscriptions dont il restitue» le sens ? Il ne connaissait certainement pas le grec. Selon Pauphilet, Clari aurait Ă©tĂ© renseignĂ© par les Latins rĂ©sidant Ă Constantinople, gens ignorants et crĂ©dules » qui lui auraient transmis un curieux folklore, superstitieux, cocasse et prophĂ©tique32 ». Il me semble plutĂŽt que par la description de ces statues Clari tente de restituer» l'image que les uns se faisaient des autres. Pour les Latins, Constantinople est la source de toute richesse il suffirait d'y vivre un an pour se revĂȘtir d'or. Les statues de femmes traduisent, d'une part le sentiment de supĂ©rioritĂ© des conquĂ©rants, dont l'entreprise est voulue par la Providence», d'autre part l'hostilitĂ© des vaincus, qui voudraient les voir jeter en un vilain lieu»33. 39ConnaĂźtre l'autre veut dire aussi essayer de le comprendre. Les chapitres XVIII-XXIX de la chronique de Clari reprĂ©sentent, on l'a vu, une longue digression pour rappeler les Ă©vĂ©nements passĂ©s Ă Constantinople pendant la seconde moitiĂ© du XIIe siĂšcle. Ces explications restent sans doute insuffisantes et pour la plupart fausses. La trame faite d'intrigues de cour, d'usurpations et de meurtres offre au lecteur une sorte de couleur locale », l'image de l'anarchie byzantine et des menaces qui guettent l'Empire. Le tableau apparaĂźt toutefois si noir qu'il est lĂ©gitime de croire que ces histoires ont pu circuler parmi les croisĂ©s avant qu'ils atteignent Constantinople. Cet effort» pour connaĂźtre l'autre est toutefois inflĂ©chi par l'effet de propagande. 34 Le style historique dans les rĂ©cits français et latins de la IVe croisade, Lille, Champion-Slatkine ... 40GĂ©rard Jacquin remarque avec raison que la plupart de ces rĂ©cits relĂšvent du conte par un certain flou chronologique et une forte valorisation morale l'empereur Isaac sera couronnĂ© le jour mĂȘme oĂč il devait ĂȘtre assassinĂ©34. La fin» de la digression reste pourtant ouverte, puisque le dernier traĂźtre et usurpateur, Murzuphle, n'a pas Ă©tĂ© puni il appartient aux croisĂ©s de rĂ©tablir la justice et de donner Ă l'aventure un dĂ©nouement heureux. 35 Relatant le mĂȘme Ă©pisode, ChoniatĂšs signale une entorse au protocole. La coutume ancestrale exigeai ... 41Enfin, Clari s'efforce de prĂ©senter la vie Ă Constantinople, les mĆurs de ses habitants. Il dĂ©crit les jeux de l'Hippodrome, qu'il connaĂźt sans doute par ouĂŻ-dire, les fĂȘtes qui marquent le retour au pouvoir d'Isaac et de son fils. Il nous fait mĂȘme assister Ă un dĂ©but d'acculturation le cĂ©rĂ©monial du couronnement de Baudouin emprunte des gestes et des piĂšces de vĂȘtements utlisĂ©s traditionnellement pour le couronnement des empereurs byzantins le palle molt rikes et molt nobles », manteau impĂ©rial drapĂ© Ă la maniĂšre d'une toge, et le molt rike mantel, qui tous estoit charkiĂ©s de rikes pierres precieuses... et resplendissoient si que che sanloit que li mantiaus fust alumĂ©s [lumineux]» XCVI, 188-19035. L'autre inconnaissable 42Le mĂȘme peut-il ĂȘtre contaminé» par l'autre, quelque peu changĂ© » en lui ? Le mĂȘme et l'autre ne sont pas en fin de compte si diffĂ©rents lors du siĂšge d'Andrinople, Henri de Flandre, frĂšre de Baudouin, prend pour Grecs les Francs qui y allaient secourir l'empereur. Dans un premier moment, les deux cĂŽtĂ©s courent aux armes, avant de se reconnaĂźtre Villehardouin, LXXVII, 158. 36 IzvoareâŠ, p. 325. 43Il y a pourtant une figure irrĂ©ductible, soustraite Ă toute classification. Ni autre» ni mĂȘme», ni proche» ni Ă©tranger», inconnaissable, tel apparaĂźt Johannitsa, roi des Blaques. Villehardouin comme ChoniatĂšs nous en ont livrĂ© un portrait bien sombre. Le Français signale sa frĂ©nĂ©sie et sa soif de destruction il prend de force les citĂ©s de Naples, Rodosto, Panedor et HĂ©raclĂ©e, Daonium et Churlot. Partout il en massacre les dĂ©fenseurs, dĂ©porte le menu peuple et, Ă chaque fois, fist tote la citĂ© fondre et abatre» XCV, 166; XCVI, 167; XCVII, 167 ; ce leitmotif scande les incursions des armĂ©es blaques. Johannitsa ignore toute pitiĂ©, mĂȘme envers ceux qui s'Ă©taient rendus Ă lui et auxquels il avait promis protection. Et sachiez que tuit li chastel et totes les citĂ©s qui s'erent rendus Ă Johannis, et cui il avoit asseurez [auxquelles il avait donnĂ© des garanties], erent tuit fondu et destruit» XCVII, 167. ChoniatĂšs le dĂ©crit comme un homme aimant le sang36 », lui attribuant le meurtre monstrueux de Baudouin, capturĂ© Ă Andrinople 37 Ibid, p. 335. Georges AkropolitĂšs ajoute quâil avait fait de son crĂąne une L'ayant tirĂ© de sa prison, il ordonne que devant lui on lui tranche, Ă l'aide d'une hachette, les jambes au-dessous des genoux et les bras au-dessous des coudes et qu'on le fasse jeter dans un ravin. AprĂšs avoir Ă©tĂ© laissĂ© pendant trois jours en pĂąture aux oiseaux, [Baudouin] est mort de façon pitoyable37. 38 DUFOURNET, Les Ă©crivains de la IVe croisade, p. 285. 44Cette cruautĂ© dĂ©termine les Grecs Ă se tourner vers les croisĂ©s, aprĂšs s'ĂȘtre rĂ©voltĂ©s contre eux Ă l'instigation du mĂȘme Johannitsa. Et, dans un surplus d'objectivité», Villehardouin leur donne la parole pour condamner la mauvaise foi du Blaque Sire, quant nos nos rendimes Ă toi, et nos nos revelames contre les Francs, tu nos juras que tu nos garderoies en bone foi et sauveroies. Tu ne l'as pas fait, ains as destruite Romenie» XCVIII, 169. Car, pour Villehardouin comme pour ChoniatĂšs, le grand tort de Johannitsa est de ne pas respecter ses engagements. Il ne tient pas parole envers les Grecs de Philippopoli qui s'Ă©taient pourtant tournĂ©s vers lui il fit exĂ©cuter l'archevĂȘque, Ă©corcher vifs ou dĂ©capiter les chefs de la citĂ©, dĂ©porter le menu peuple, dĂ©truire la ville, une des trois meillors de l'empire de Constantinople» XCII, 163; une dĂ©loyautĂ© aggravĂ©e par une hypocrisie particuliĂšrement raffinĂ©e38». AprĂšs la reddition du chĂąteau de la Serre, trop prĂ©cipitĂ©e selon Villehardouin, Johannitsa jura aux habitants, avec vingt cinq de ses plus hauz homes », qu'il les conduirait sains et saufs, avec leurs armes et leurs chevaux, Ă Salonique, Ă Constantinople ou en Hongrie. Pendant trois jours lor fist molt bel semblant et lor envoia ses presenz » XC, 161. Mais ensuite il s'empara de leur avoir, dĂ©capita les plus grands et fit mener en Bla-quie nuz et deschauz et Ă piĂ© [...] les povres et les menus » Ibidem. Cette duplicitĂ© fonciĂšre de Johannitsa suscite l'horreur du chroniqueur, dĂ©fenseur de la loyautĂ© comme la plus haute vertu. C'est l'ambiguĂŻtĂ© constitutive du personnage, l'impossibilitĂ© Ă le classer, qui fait taire Ă Villehardouin que Johannitsa Ă©tait chrĂ©tien, qu'il reconnaissait la suprĂ©matie du pape, lequel lui avait remis sceptrum regni et regium diadema. 45Comme d'habitude, Clari propose une image plus nuancĂ©e. Johannitsa avait recherchĂ© l'alliance des Francs en Ă©change de se voir reconnaĂźtre roi de son pays, il promet de se constituer leur vassal et de les aider Ă prendre Constantinople Ă la tĂȘte d'une armĂ©e de 100 000 hommes LXIV, 142. Les barons repousseront son offre brutalement et avec hauteur si respondirent que ne de lui ne de s'aiwe [aide] n'avoient il cure, mais bien seust il que [...] mal li feroient s'il pooient et il leur vendi puis molt kier [il le leur fit payer trĂšs cher par la suite] » LXV, 144. En effet, au siĂšge d'Andrinople, quand les Latins virent les Coumans alliĂ©s de Johannitsa, a ches plichons [pelisses] vestus, si ne les douterent ne ne prisierent nient plus que une trope d'enfans [ne les estimĂšrent pas plus qu'une troupe d'enfants] ». Mais eux si courent sus aus Franchois, si en ochisent mout, si les desconfisent il tous en chele batalle. Si fu perdus li empereres, que on ne seut onques que il devint» CXII, 208. Selon Clari, Dieu punit ainsi les Latins pour leur orguel et pour le male foi qu'il avoient portee a le povre gent de l'ost, et les oribles pekiĂ©s qu'il avoient fais en le chitĂ©, aprĂšs chou qu'i l'eurent prise » Ibidem - Je souligne aveu de culpabilitĂ© et reconnaissance des torts des conquĂ©rants qui n'Ă©taient peut-ĂȘtre pas dans leur bon droit. Villehardouin semble suggĂ©rer qu'avec un homme aussi rusĂ© il n'y avait pas d'autre solution possible. 46Pierre de Bracheux, le hĂ©ros prĂ©fĂ©rĂ© de Clari, n'hĂ©site pas Ă rendre visite Ă Johannitsa, qui se rĂ©vĂšle Ă cette occasion un homme aussi courageux qu'instruit. Il s'Ă©tonne» que de si bons chevaliers soient venus de si loin pour conquerre terre et, lorsque le Français Ă©voque, pour justifier l'entreprise, l'histoire de Troie la Grant, le Blaque rĂ©pond qu'il la connaissait depuis longtemps cf. CVI, 200. En somme, Johannitsa n'Ă©tait pas un sauvage mĂ©prisable puisque li Apostoiles y envoia un cardounal pour lui coroner si fu coronĂ©s a roi » LXV, 144 et que l'empereur Henri acceptera d'Ă©pouser la fille du roi blaque, qui le comblera de prĂ©sents cf. CXVII. 47Villehardouin et ChoniatĂšs donnent un portrait noir de Johannitsa parce que, Ă force de vouloir ĂȘtre tantĂŽt avec les uns tantĂŽt avec les autres, celui-ci n'est ni Ă©tranger ni prochain sa duplicitĂ© le rend inclassable. L'autre reconnu 39 La tentation de lâOrient dans le roman mĂ©diĂ©val. Sur lâimaginaire mĂ©diĂ©val de lâAutre, Paris, Champ ... 48Opaque, imaginĂ© ou inclassable, l'autre est-il vouĂ© Ă rester inconnaisable, murĂ© dans son altĂ©ritĂ©? Il peut devenir le prochain» Ă condition de renoncer Ă sa diffĂ©rence, de partager le systĂšme de valeurs de l'autre. Ainsi que le remarque Catherine Gaullier-Bou-gassas, l'Autre oriental n'est cĂ©lĂ©brĂ© qu'aprĂšs avoir Ă©tĂ© assimilĂ© Ă une figure du MĂȘme39 ». Autrement dit, il doit partager les valeurs de l'Occident, sinon s'y soumettre, au risque de ne conserver de son identitĂ© que sa fabuleuse richesse. Tel apparaĂźt Manuel ComnĂšne 49 Molt preudons [.] et li plus rikes de tous les crestiens, [.] chis empereres amoit molt Franchois et mout les creoit» Clari, XVIII, 68. Il sera toutefois obligĂ© d'expulser les Francs de Constantinople sous peine de se voir retirer l'appui de ses sujets. 50Mais le mĂȘme peut lui aussi s'aliĂ©ner et devenir autre». La seror le roi de France», AgnĂšs, sĆur de Philippe-Auguste, que les barons francs souhaitent rencontrer aprĂšs avoir rĂ©tabli Alexis sur le trĂŽne, leur fist molt mauvais sanlant». Elle prĂ©tend ne pas comprendre le français et fait appel Ă un latimier [interprĂšte] LIII, 128. En fait, veuve de deux empereurs, Alexis II et Andronic, fort mĂȘlĂ©e aux intrigues de la cour, elle espĂ©rait faire monter sur le trĂŽne son troisiĂšme mari, ThĂ©odore Branas. LĂ encore, l'intĂ©rĂȘt politique est responsable de la perte d'identitĂ© et du brusque oubli» de la langue maternelle. 51L'autre peut toutefois ĂȘtre acceptĂ© en tant que tel Ă condition d'ĂȘtre reconnu» comme prochain. Clari nous raconte l'histoire extraordinaire du roi de Nubie ». Image-standard de l'autre exotique, noir de peau, ce roi, dont le pays estoit encore chens journees de la Jherusalem », Ă©tait venu en pĂšlerinage Ă la ville Sainte, avait poursuivi jusqu'Ă Constantinople et dĂ©clarĂ©, lui aussi Ă travers un interprĂšte -dans son cas c'est tout naturel - avoir l'intention de continuer jusqu'Ă Rome et, plus loin, Ă Saint Jacques, et puis revenir s'ent ariere en Jherusalem, s'il pooit tant vivre » LIV, 130. Ce roi noir, qui refait le trajet du christianisme, unissant Orient et Occident, est chrĂ©tien, comme tout son peuple. Il le prouve par la croix qu'il porte en mi le front, qui li avoit estĂ© faite d'un caut fer» Ibidem, reçue, comme tous ceux de sa terre, au moment du baptĂȘme. Cette croix inscrite dans la chair, non pas cousue sur le vĂȘtement, donne son identitĂ© profonde et fait reconnaĂźtre dans l'Ă©tranger le prochain. Qui est mon prochain ? 40 CHONIATĂS, IzvoareâŠ, p. 317. 52L'autre ne peut-il ĂȘtre reconnu qu'Ă la condition d'arborer un signe distinctif qui l'identifie comme prochain? Ne peut-on pas arracher son masque, l'obliger Ă se dĂ©voiler? Johannitsa le fait au siĂšge d'Andri-nople, voulant connaĂźtre les plans de l'ennemi et sa façon de combattre40». Il fera attaquer leurs provisions par ses alliĂ©s Scithes, sans plus. Le lendemain, il fera rĂ©pĂ©ter l'opĂ©ration, mais les Latins se laisseront cette fois-ci entraĂźner trop loin, au lieu oĂč on leur avait prĂ©parĂ© un piĂšge et oĂč les ennemis guettaient» Ibidem. Ces gens Ă la nuque raide», Ă cause de leurs armures, sont dĂ©sarçonnĂ©s et succombent sous le nombre. Ainsi pĂ©rit la fleur des troupes latines et ses plus fameux combattants Ă la lance» Ibidem. Le comte Louis de Blois y trouva Ă©galement la mort et l'empereur Baudouin y fut capturĂ©. 41 BlessĂ©, le marquis de Montferrat sera abandonnĂ© par les siens lorsquâils 53Mais ne peut-on pas dĂ©masquer l'autre en dehors d'une attitude utilitaire, visant Ă se l'approprier? Certes, il n'est question d'aucun cĂŽtĂ© de dĂ©possession de soi, condition indispensable Ă une authentique connaissance de l'autre. Pourtant Villehardouin, le plus rĂ©fractaire » Ă ce qui est diffĂ©rent, semble rĂ©pondre Ă cette question par l'affirmative. La fin de sa chronique nous prĂ©sente les Latins attaquĂ©s de partout, en butte Ă toutes les difficultĂ©s, Ă toutes les divisions, Ă toutes les dĂ©loyautĂ©s41. MĂȘme atmosphĂšre sombre de trahisons, d'intrigues dans la derniĂšre partie de la chronique de Clari. On dirait que les Latins ont Ă©tĂ© contaminĂ©s par la dĂ©loyautĂ© des Grecs et ont transmis Ă ceux-ci leur cupiditĂ©. Le vainqueur» est devenu vaincu» ou, plutĂŽt, il en partage la condition. Le mĂȘme et l'autre ne sont plus si diffĂ©rents, ils sont devenus semblables dans la fragilitĂ©, dans l'Ă©chec. 42 E. LĂVINAS, La pensĂ©e de lâĂȘtre et la question de lâautre », De Dieu qui vient Ă lâidĂ©e, Paris, J ... 43 E. LĂVINAS, De lâUn Ă lâAutre. Transcendance et Temps », Entre nous. Essais sur le penser-Ă -lâaut ... 54Les deux chroniques françaises s'achĂšvent sur une image de grans desconfiture et de mort, suprĂȘme dĂ©possession de soi. C'est justement la mort de l'autre qui met en cause et en question le mĂȘme, lui rappelant que l'autre lui est intĂ©rieur, qu'il en est, d'une certaine façon, responsable. Si la voix qui appelle l'autre par son nom ne se fait pas encore entendre, obligeant chacun Ă reconnaĂźtre celui qui l'appelle et Ă se connaĂźtre lui-mĂȘme - telle Marie-Madeleine dans le jardin du Golgotha ayant reconnu le MaĂźtre lorsqu'il l'appelle par son nom cf. Jn 20, 11-17 - la constatation d'une commune vulnĂ©rabilitĂ© dĂ©voile un dĂ©but de sympathie. Le prochain n'est pas forcĂ©ment celui qui me ressemble, qui est comme moi, mais aussi celui qui est diffĂ©rent, mĂȘme si cette diffĂ©rence est difficile Ă connaĂźtre et Ă accepter. C'est dans ce dĂ©rangement incessant du mĂȘme par l'autre42 », dans ce rappel de ma responsabilitĂ© par le visage qui m'assigne, [...] c'est dans cette mise en question qu'autrui est prochain43 ».
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